Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

samedi, 31 janvier 2015

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (39)

 

 

 

Introduction.

 

 

« 87. Un livre escript en lettre de fourme, auquel est le Roman de la Rose, le Livre de la Violette, le Livre de la Pencherie et le Testament de maistre Jehan de Mehun, bien historié et enluminé de blanc et de noir [en grisaille ; cf. notice 29] ; et au commencement du second fueillet a escript : Que joy après ; couvert de drap d’or, à deux fermoers d'argent doré, esmailliés l’un d'un demi-ymaige de Dieu, et l'autre d'un demi-ymaige de Notre Dame tenant son enfant ; lequel Mons. acheta la somme de cent vingt escus d'or comptant._100 liv. »

 

Outre le Roman de la Rose, commencé par Guillaume de Lorris (entre 1230 et 1235) et achevé par Jean de Meung (entre 1275 et 1280), ce livre contient Le Livre de la Violette ou Roman de Gérard de Nevers, par Gerbert de Montreuil, un poète du nord de la France ayant vécu à la fin du XIIIe siècle, continuateur de Chrétien de Troyes, et le Testament de Jean de Meung, recueil des dernières poésies de l'auteur (il s’agit de quatrains, suite de conseils destinés aux différents membres de la société). 

Le Livre de la Pencherie reste tout à fait inconnu ; est-ce une suite du Livre de la Violette, un livre perdu du Cycle arthurien ?

 

 

« 88. Un petit livre du Thrésor de maistre Jean de Mehun, de lettre de fourme, bien historié et enluminé, et au commencement du second fueillet est escript : Qui comme ; couvert de veluyau vermeil, à deux fermoers d'or tout plains ; lequel Mons. de Bavière [Étienne III, duc de Bavière (1337-1413), père d'Isabeau de Bavière, épouse de Charles VI] donna à Mons._10 liv. »

 

C'est le Testament de Jean de Meung, ainsi intitulé dans beaucoup de manuscrits, et dont il est question ci-dessus.

 

 

(à suivre.)

 

 

lundi, 26 janvier 2015

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (38)

 

 

 

 

Introduction.

 

 

« 85. Un livre appellé Terance, escript en latin de lettre de fourme, très-bien historié et enluminé ; et au commencement du second fueillet a escript : Nempe ; couvert de drap de soye vermeil, fermant à deux fermoers d'argent doré sans tixus ; lequel livre fut donné à mondit seigneur en janvier l’an mil cccc et sept par monsieur Martin Gouge, [a]lors son trésorier général, et à présent évêque de Chartres [Martin Gouges, ou Martin de Charpaigne (vers 1370-vers 1444), ami de Jean de Berry, et chancelier de France sous Charles VII]._30 liv. »

 

« 86. Un livre appellé Terance, de lettre de fourme et glosé, qui commance au second fueillet : Fore sibi hanc, fermant à deux fermoers d'argent doré, esmailliés aux armes de feu Mgr de Guyenne._75 liv. »

 

 

Térence, né à Carthage vers -190 avant J.-C. et mort vers -159, était beau, et il était brillant : esclave dès son enfance, il fut vite affranchi. Durant sa vie brève, il composa six comédies (L'Héautontimoroumenos, L'Eunuque, Le Phormion, L'Hécyre, Les Adelphes et L'Andrienne) qui, par extraordinaire, sont parvenues jusqu’à nous.

 

 

 

 

(à suivre.)

 

 

 

mercredi, 21 janvier 2015

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (37)

 

 

 

Introduction.

 

Belles-Lettres

 

Poésie

 

 

« 82. Un livre escript en françois de lettre de fourme, d'Ovide Metamorphorios, couvert d'un cuir vermeil empraint à deux fermoers d'argent doré, tout plains, et les tixus de soye vermeille._30 liv. »

 

« 83. Un petit livre appellé : Ovide Metamorphorios, escript en françois de lettre de court, et glosé en plusieurs lieux, couvert de cuir vermeil empraint et fermant à quatre fermoers de cuivre._30 liv. »

  

« 84. Un livre d'Ovide Métamorphorios, escript en françois rymé, et au commencement du second fueillet a escript : De la Disputoison ; et est couvert de cuir vermeil empraint à deux fennoers d'argent néellés et tixus rouges, garni de plusieurs seigneaulx._25 liv. »

 

 

Il s’agit de L'Ovide moralisé, traduction, en 72000 vers octosyllabiques environ, des Métamorphoses d’Ovide. Cette traduction adaptée anonyme, longtemps (et faussement) attribuée à Philippe de Vitry et à un certain Crestien li Gois, semble avoir été rédigée entre 1317 et 1328, et est dédicacée à Jeanne de Bourgogne, reine de France, épouse de Philippe V le Long.

Charles d’Orléans possédait lui aussi L’Ovide moralisé. (Cf. notice 2, à la fin du billet.)

 

 

(à suivre.)

 

 

 

samedi, 17 janvier 2015

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (36)

 

 

 

Introduction.

 

Sciences & Arts (suite)

 

Astrologie & magie

 

 

« 79. Un petit livre d'astrologie en latin, ouquel [sur lequel] sont les quatre élémens et les douze signes figurés et les planettes ; où il a escript au commencement du second fueillet : Nomen itaque ; couvert de cuir vermeil empraint à deux fermoers de cuivre ; lequel livre l'abbé de Bruges donna à Monseigneur à Paris le vije jour de juin l’an dessut dit mil cccc et trois [7 juin 1403]._100 s. »

 

Charles V, qui fonda à Paris un collège d’astrologues, ne fit qu'entériner le fait que l'astrologie était pratiquée à la cour royale et parmi les puissants du monde d'alors depuis le bas Moyen Âge, malgré les condamnations officielles de l'Église (ce qui n'empêcha pas nombre de papes de s'y adonner).

 

« 80. Un livre en françois des sept planettes, autrement magique, historié en plusieurs lieux, et au commencement un couronnement de Dieu et Nostre Dame d'enlumineure ; couvert de cuir empraint à quatre fermoers d'argent doré esmailliés aux armes de Monseigneur._50 liv. »

 

« 81. Deux gros livres de magique escripts en espagnol, l'un couvert de pel [peau] rouge et l'autre d'une blanche pel sans ais, lesquels M. Arnoul Belin [premier trésorier de la Sainte-Chapelle de Bourges, qui sera Maître clerc de la Chambre des comptes sous Charles VII] a eu comme l’an dit._ [pas d’estimation mentionnée].»

 

Le mot magique, en moyen français, est un adjectif et un substantif féminin (signifiant, bien sûr, "magie").

La plupart des puissants et des érudits de l'époque de Jean de Berry s'intéressaient de près à la magie, entendue comme une philosophie occulte, un ésotérisme : les manuscrits du duc devaient, sans doute, détailler des figures et des formulations magiques, les noms d'anges ou d'esprits à invoquer pour obtenir ce que l'on désire.

 

 

(à suivre.)

 

 

jeudi, 15 janvier 2015

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (35)

 

 

 

Introduction.

 

 

 

« 74. Un livre du Mirouer des dames, escript en françois de lettre de somme ; et au commencement du second fueillet a escript : Ter et reposer ; couvert de veluyau vermeil à deux fermoers de laiton hachiés et cinq boulions de mesme sur chascun ais tout plains._20 liv. »

 

Hiver de Beauvoir indique que cet ouvrage fut « fait par un moine franciscain pour Jeanne de Navarre, femme de Philippe le Bel ». Un "Miroir des dames" est un recueil de conseils moraux destinés à une dame, généralement de haut lignage.

 

 

« 75. Un livre du Gouvernement des roys, en françois, qui se commence : Regnabit rex et sapiens erit, historié au commencement d'un roy estant en une chaiere [chaire] et de plusieurs personnages estant à ses piés ; couvert d'un cuir vermeil empraint à deux fermoers d'argent doré esmailliés aux armes de Monseigneur ; et sont fais les tixus à fleurs de lis d'or de Chippre [Chypre]._ 12 liv. 15 s. »

 

Le théologien et philosophe italien Gilles de Rome (1247-1316), surnommé le « Prince des théologiens » ou le « Docteur très fondé », est l’auteur de ce De regimine principum (Traité du gouvernement des princes) traduit en français par Henry de Gauchy, chanoine de Saint-Martin de Liège, vers 1282.

Il est question, dans ce livre largement inspiré d’Aristote et de saint Augustin, de morale, d’économie et de politique : son influence fut considérable aux XIIIe et XIVe siècles.

 

 « 76. Un livre de l’Information des roys et des princes, fait et compilé par un maître en théologie de l’ordre de saint Dominique ; et au commencement du second fueillet a escript : Vivans ; couvert de cuir rouge empraint à deux fermoers de cuivre ; lequel Mons. acheta de maistre Regnault du Montet, libraire demeurant à Paris, au mois de février l’an mil cccc et neuf [1409]._6 liv. 5 s. »

 

Il s’agit d’une autre traduction, par le théologien Jean Golein (ou Jehan Goulain, vers 1325-1403), de l’ouvrage de Gilles de Rome, De regimine principum, de même que les manuscrits suivants :

 

« 77. Un livre en françois, nommé : le Livre du gouvernement des roys et des princes, historié au commencement d'un roy et d'un religieux qui lui présente un livre._62 s. 6 d[eniers].»

 

« 78. Un autre livre appellé : le Livre du gouvernement des roys et princes, qui se commence au second fueillet : Mérites au peuple ; couvert d'un cuir rouge à deux fermoers de laiton._ 7 liv. 10 s. » 

 

 

(à suivre.)

 

 

 

lundi, 12 janvier 2015

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (34)

 

 

 

Introduction.

 

 

« 72. Un livre appellé Si no die, escript en françois de lettre de fourme, à deux fermoers d'argent doré esmailliés à fleurs, et sur chascun ais v [cinq] clous de cuivre doré, que Monseigneur acheta à Paris au mois de février 1403 de Jean le Moutardier, écrivain de fourme, demeurant à Paris._15 liv. »

  

« 73. Un livre appellé : Si no die, escript en françois de lettre de fourme, et au commencement du second fueillet a escript : L’ymage de Dieu ; couvert de cuir vermeil empraint à deux fermoers de laiton, et sur chascun ais cinq boullons de mesme._13 liv. »

 

J'ai trouvé la trace d'un certain Jehan le Moutardier, prévôt de Corbeil en 1332. Peut-être l'auteur (ou le copiste) de ces deux livres, dont j'ignore tout du contenu, est-il un de ses descendants ?

 

 

(à suivre.)

 

 

vendredi, 09 janvier 2015

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (33)

 

 

 

 

Introduction.

 

 

 

« 69. Un livre en françois, appellé le Livre de l’empereur céleste, historié au commencement de Dieu, de Notre Dame et de plusieurs sains, et d'une femme écrivant en une chayere [chaire], et au dessous les armes de Mons. d'Orléans ; couvert de veluyau vermeil à deux fermoers esmailliés des armes de Monseigneur et de Mons. d'Orléans._15 liv. »

 

Hiver de Beauvoir écrit ceci : « La femme représentée au frontispice de ce volume écrivant assise en une chaire, me fait croire que le Livre de l'empereur céleste est également de Christine de Pisan, et a été dédié par elle au duc d'Orléans, dont il porte les armes ; puis, ce prince, en 1398, en fit faire cette copie, qu'il donna au duc de Berry. C'est, du moins, ce que rendent vraisemblables les quittances publiées par M. le Roux de Lincy. »

 

Cependant ce livre est aujourd'hui perdu.

 

 

« 70. Un petit livre en françois de lettre ronde, intitulé : des bonnes Mœurs lequel parle du remède qui est contre les sept pechiés mortels des trois Estas ; et au commencement du second fueillet a escript : Et tous les siens ; historié en plusieurs lieux ; couvert de cuir vermeil empraint à deux fermoers de laiton doré, hachiés [ciselés] des armes de Mons. le duc, et sur chascun ais cinq boulions de mesme ; lequel livre fut donné à Monseigneur le iiije jour de mars mil cccc et neuf [4 mars 1409] par frère Jacques le Grant augustin._6 liv. 5 s. »

 

 

Jacques Le Grant, ermite de Saint-Augustin (1360 ?-1425 ?), est l’auteur de ce Livre des bonnes mœurs, adaptation libre de la dernière partie de son Sophilogium (quatrième traité du livre II et intégralité du livre III) un traité de sciences morales (1398). Le manuscrit de Jean de Berry est consultable ici. On peut lire, au folio 1r, l’ex-libris en lettres ornées de Jean Flamel : « Ce livre fist frère Jacques le Grant, de l'ordre des hermites saint Augustin, et le donna à Jehan, fils de roy de France, duc de Berry et d'Auvergne, comte de Poitou, d'Étampes, Boulongue et Auvergne / Flamel. » 

 

 

« 71. Un livre appellé le Livre des Esthas, escript en françois de lettre de court, historié au commencement d'un roy séant en une chayere et d'un religieux qui lui présente un livre, couvert de cuir vermeil empraint à deux fermoers de cuivre._75 s. »

 

Hiver de Beauvoir pense qu’il s’agit encore du Livre des bonnes mœurs. Le mot « Esthas » ("états") serait alors à comprendre comme "les agissements, la conduite ou la façon de se comporter".

 

 

(à suivre.)

 

 

vendredi, 02 janvier 2015

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (32)

 

 

 

Introduction.

 

 

 

« 68. Un livre qui est intitulé : le Livre de la paix escript en françois de lettre de court, et au commencement du second fueillet a escript : Loisibles ; couvert de cuir vermeil empraint à deux fermoers de laiton et cinq boulions de mesmes sur chascun aïs, que damoiselle Xristine de Pizan donna à Mons._5 liv. »

 

Ce Livre de la Paix de Christine de Pisan (1364-1430), écrit entre 1412 et 1414, n’est pas disponible dans une édition moderne en français ; un manuscrit est conservé à la Bibliothèque nationale de France.

L'ouvrage débute par ces mots : « Cy commence la table des rubriches [rubriques] du Livre de Paix, lequel s'adrece a tres noble et excellent prince, Monseigneur le duc de Guienne, ainsné filz du roy de France [le Dauphin Louis de France (1397-1415)], encommencié le premier jour de septembre, aprés l'apointement de la paix juree en la cite d'Auxerre entre noz seigneurs de France en l'an de grace mil IIII cent et douze...

Le premier chapitre est une louenge a Dieu a cause de la paix.

De la bouche des enfans et des alectans [nourrissons (ceux qu'on "allaite")], voirement, nostre seigneur Dieu, roy celeste et tout puissant qui deffaces et ostes, quant il te plaist, le misere du monde, est ton plaisir d'avoir parfaicte louenge... »

Il se termine ainsi : « ... en tel maniere que la couronne de laurier comme en fin par victoire appartient et est donc deue [due] au vainquant par travail honnorable ne sera pour tant tollue [enlevée, ôtée (du verbe « tolir »)] au labour de ceste dicte oeuvre, laquelle ta digne haultesce ait agreable et tiengne a memoire, moiennant Dieu, qui en tout grace te parface. Amen. Cy fin le Livre de Paix. Explicit. »

 

 

 

(à suivre.)

 

 

mercredi, 31 décembre 2014

Isnel encore

 

  

 

Lorsque je la rencontrai dans un livre (je ne me rappelle plus lequel, du reste) pour la première fois, j'aimais beaucoup cette phrase qui relève à la fois du jeu de mots (qu'en général je n'aime guère) et de l'aphorisme, celui-ci fort beau, et discrètement subtil : 

 

« Les anges ont des ailes parce qu'ils se prennent à la légère. » 

 

L'auteur du livre ne citait pas sa source (je l'aurais, sinon, immédiatement notée, à l'époque). Cependant je retrouvai plus tard la même phrase, un peu différente, dans un essai de Salah Stétié consacré à Rimbaud (Rimbaud, le Huitième Dormant) : « Si les anges volent, c'est parce qu'ils se prennent à la légère », et cette fois son auteur était mentionné : G. K. Chesterton, cet étrange et fécond écrivain, dont j'ai lu quelques romans ainsi que La Morale des elfes, Orthodoxie et Saint Thomas du Créateur, un très beau livre sur Thomas d'Aquin. Cette phrase était donc traduite de l'anglais ; mais au fait, comment dit-on "prendre à la légère", dans la langue de Shakespeare ? "To take lightly", semble-t-il. Cependant, cette expression signifie-t-elle exactement la même chose qu'en français ?

 

Le poète ne citait pas l'ouvrage où se trouve cette phrase, et je me mis, en vain, à feuilleter l'œuvre de Chesterton à sa recherche ; je savais qu'elle ne se trouvait pas dans les livres que j'avais lus, aussi ai-je fréquenté bibliothèques et librairies en ayant toujours quelques minutes à consacrer à cette phrase bien cachée. En déroulant l'Internet, je n'obtins pas plus de résultats ; à peine ai-je trouvé une petite variante (« L'ange, s'il vole, c'est parce qu'il... »).

 

Je me demande alors si cette phrase n'est pas de celles qu'on attribue depuis "toujours" à un auteur — cette citation que l'on a trouvée dans un livre secondaire qui la mentionnait laconiquement, et qu'à son tour on a reprise, en passant rapidement sur une source manquante, semblant aller de soi. Une phrase, en somme, créée non pas par un auteur, mais par les livres, les bibliothèques, les lecteurs, les auteurs qui lisent et citent et recopient, avec confiance...

 

... À moins que l'un de mes Lecteurs n'ait su trouver la bonne page ?

 

 

 

lundi, 29 décembre 2014

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (31)

 

 

 

Introduction.

 

 

 

« 67. Un livre de François Pétrarque, des Remèdes de l'une et l’autre fortune, translaté en françois, couvert de veluyau vermeil à deux fermoers d'argent doré esmailliés aux armes de Mons. et de Mons. d'Orléans._30 liv. »

 

Ce bel ouvrage, traduit de nos jours sous le titre Contre la bonne et la mauvaise fortune, fut écrit vers 1366 par Pétrarque qui le présenta lui-même ainsi à son lecteur : « Un recueil de remèdes très courts pour chaque malheur comme pour chaque bonheur qui pourrait te nuire, et pour chaque coup de l'une et l'autre fortune, à la manière d'un antidote efficace contre une maladie à double effet, tout cela rassemblé par un ami sous un petit volume, pour que tu l'aies partout et toujours sous la main. » (Cf. la jolie édition de ce livre aux éditions Payot, dans la collection Rivages poche/Petite bibliothèque, en 2001.)

La traduction française du manuscrit de Jean de Berry, selon toute vraisemblance, est due à Nicolas Oresme.

 

 

 

(à suivre.)

 

 

 

samedi, 27 décembre 2014

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (30)

 

 

 

 

Introduction.

 

 

« 66. Un autre livre des Dis des philosophes, de la Vie de plusieurs Sains, avec le Bestiaire ; couvert de cuir vermeil empraint à quatre fermoers de cuivre et tixus de fil._8 liv. 15 s. »

 

Il s’agit des Dits des philosophes, ou Dits moraux des philosophes (vers 1401) de Guillaume de Tignonville (dont il a été question dans la notice 59). Un exemplaire du livre peut être consulté ici.

 

Le Bestiaire qui se trouve ici à la suite des Dits des philosophes, nous dit Hiver de Beauvoir, « est un bizarre traité érotique de Richard de Furnival [Fournival]». L’érudit et poète Richard de Fournival (1201-1260) écrivit ce Bestiaire d’Amours vers 1250. À travers la présentation d’une soixantaine d’animaux (dont le coq, le singe, le lion, la licorne ou l’hirondelle), l’auteur décrit les étapes, selon la tradition courtoise, de l’amour d’un amant pour sa dame. Lors d’une exposition sur Gaston Fébus au musée de Cluny, je pris la photographie d'une page de ce livre.

 

 

(à suivre.)

 

 

lundi, 22 décembre 2014

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (29)

 

 

 

Introduction.

 

 

 

« 61. Un livre d'Éthiques et politiques, en deux volumes, escript en françois de lettre de fourme ; et au commencement du second fueillet du premier volume des Estats et esthiques a escript : Ces si come, et au commencement du second fueillet de l'autre volume a escript : Et cette communite ; et sont couverts chascun de veluyau vermeil, à deux fermoers d'argent doré, esmaillés l’un aux armes de Mons., l’autre aux armes de feu Mgr d'Orléans, lequel donna les deux volumes à Mons._75 liv. »

 

Je pense qu'il s'agit de l’Éthique à Nicodème, de l’Éthique à Eudème et de la Politique d’Aristote.

 

 

« 62. Un livre d'Éthiques escript en françois, de lettre de fourme, et au commencement du second fueillet a escript : En peut l’en ; couvert de veluyau vermeil à deux fermoers d'argent doré, esmailliés l'un de saint Jehan, l'autre de la Magdelaine, et cinq boulions de mesmes sur chascun ais, lequel Bureau de Dammartin, bourgeois et marchand de Paris, a fait faire par le commandement de Monseigneur._30 liv. »

 

Il s’agit (toujours selon moi) de l’Éthique à Nicodème et de l’Éthique à Eudème d’Aristote.

 

« Cette traduction est celle de Nicolas Oresme, précepteur de Charles V, mort en 1382, qui fut en 1488 imprimée par Verard. Le duc avait chargé Bureau de Dammartin d'en faire faire une copie. Celui-ci, modestement qualifié de bourgeois et marchand de Paris, était le fils de Bureau de la Rivière, ministre favori de Charles V ; il s'appelait de Dammartin, ou comte de Dammartin, parce qu'il avait épousé l’héritière de cette maison », écrit Hiver de Beauvoir.

 

 

« 63. Un petit livre en françois, escript de lettre de court, du Gouvernement des roys et des princes, appellé le Secret des secres [sic], que fit Aristote, couvert de cuir vert à deux fermoers de laiton._10 s. »

  

Le Secret des Secrets est une encyclopédie, écrite sous la forme d’une vaste lettre, traduite d’un livre anonyme arabe du Xe siècle, le Kitâb sirr al-‘asrâr (Le Livre des secrets), et faussement attribuée à Aristote : ce dernier aurait là composé un « miroir du prince », conseils divers à destination d’Alexandre le Grand, dont le Stagirite avait été le percepteur, au moment de la conquête de la Perse. Le livre a été traduit en latin par un clerc nommé Philippe de Tripoli, dont nous ignorons tout, après 1227, sous le titre Liber qui dicitur Secreta secretorum, vel de regimine regum et principum. On y trouve des exposés de politique, de morale, d’alchimie, d’astrologie, de médecine, de magie… C’était en quelque sorte la référence encyclopédique du bas Moyen Âge. Je rappelle que cette œuvre se trouvait également dans la bibliothèque de Charles d'Orléans, à Blois.

 

« 64. Un autre semblable livre, et de semblable matière comme le précédent, qui fut de feu Mons. d'Estampes [Louis d’Évreux (1336-1400), pair de France, arrière-petit-fils du roi Philippe III de France, mort d’apoplexie le 6 mai 1400 à Paris alors qu’il dînait avec Jean de Berry], couvert de cuir vermeil empraint, et sont cinq cloux sur chascun ais._50 s. » 

 

 

(à suivre.)

 

 

 

 

 

dimanche, 21 décembre 2014

Anciennes notes

 

 

 

 

DSC_2661 b.jpg

  

Antiphonaires (fin du XVIIIe s.), dans la sacristie
de la collégiale Saint-Barnard (XIe-XVIIIe s.), à Romans-sur-Isère, dans la Drôme,
photographie : juillet 2014.

 

 

 

vendredi, 19 décembre 2014

La Librairie de Jean, duc de Berry, au château de Mehun-sur-Yèvre, en 1416 (28)

 

  

 

Introduction.

 

 

 Sciences & Arts (suite)

 Philosophie morale 

 

 

 

« 60. Un livre en françois, appellé le Livre des problèmes d'Aristote, translaté et exposé de latin en françois par maistre Evrart de Coussy, jadis physicien [médecin] du roi Charles quint [Charles V de France], escript de lettre courant, historié au commencement et en plusieurs lieux, et au commencement du second fueillet a escript : François ; couvert de cuir vermeil empraint, fermant à quatre fermoers de laiton, et sur chascun ais a cinq boullons de laiton ; lequel fut donné à Mons. au mois de septembre 1405 par messire Guillaume Boisratier, à présent archevêque de Bourges [depuis 1409]._75 liv. »

 

On sait aujourd’hui que ces Problèmes, une collection de questions et de réponses sur des sujets très divers (médecine, musique, sciences naturelles, mathématiques, etc.), ne sont pas l’œuvre d’Aristote, mais plutôt une compilation de son école, même si certains passages sont du philosophe.

 

Évrart de Coussy (ou de Couty, ou de Conty), écrivain, et membre de la faculté de médecine de Paris (il fut maître régent de 1353 à 1405, année de sa mort), fut l’un des médecins de Charles V et de Blanche de Navarre, veuve de Philippe VI. Il fut également l’un des traducteurs à la cour royale. Outre sa traduction de ces Problèmes pseudo-aristotéliciens, il est l’auteur des Eschés [Échecs] amoureux, poème allégorique de plus de 30000 vers récrivant le Roman de la Rose, et de leur commentaire en prose, le Livre des Eschez amoureux moralisés (vers 1400).

 

 

(à suivre.)

 

 

 

 

mercredi, 17 décembre 2014

Coquilles

 

 

 

 

La correction d'épreuves la plus rigoureuse, curieusement, n'empêche presque jamais l'oubli de quelques coquilles, un pluriel négligé, un "pas" pour un "par", un mot répété inutilement ou une virgule en début de ligne. Presque aucun de mes livres imprimés, à l'instar de nombre de ceux que je lis, n'a su éviter cet écueil ; il semble bien que Titivillus, ce démon médiéval qui, tout en les provoquant, recueillait les syllabes et les lettres omises (ou fautives) des chanteurs de psaumes et des copistes, continue d'exercer son discret mais malicieux empire sur les mots. Je me souviens d'un fâcheux "interpelé", sur la première page de la première partie d'un livre mien publié en 2005. Je me rappelle un auteur de mes amis, qui s'aperçut que l'un des mots du titre de son ouvrage était au pluriel sur la couverture et au singulier sur la page de garde.

 

Ces fautes-là recommencent à leur façon la lettre volée d'Edgar Poe ; elles semblent si criantes et si évitables, si improbables même, qu'arrivera sans doute le jour, s'il n'est pas déjà arrivé, où le nom même de l'auteur sera mal orthographié sur la couverture de son livre... Un autre fait curieux est que la coquille, bien souvent, ne se voit qu'une fois qu'elle est définitivement imprimée ; dans le fichier informatique, elle se faisait timide, sage et candide, transparente en un mot. Tout se passe comme si, avant l'impression, une faute connaissait infailliblement le moyen de se voiler de gaze. J'ajouterai qu'elle apparaît dans toute sa splendeur désolée d'abord à l'auteur du livre, et seulement ensuite, pour une bien moindre part, à ses lecteurs, ce qui est à la fois cruel et consolant. La première coquille d'impression dans l'un de mes livres m'a navré, puis je me suis incliné devant l'évidence : ces choses-là sont plus rusées qu'Ulysse.  Au moins ne finirai-je pas comme Alexandre Guidi de Pavie, ce poète italien qui, en 1712, raconte-t-on, alors qu'il s'apprêtait à offrir au pape Clément XI les Homélies de son bienfaiteur qu'il avait paraphrasées et mises en vers, découvrit quelques fautes d'impression dans sa belle édition, et en mourut de chagrin.