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vendredi, 08 novembre 2019

Le médaillon

 

 

 

 

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Hans Holbein le Jeune (vers 1497-1543), Portrait d'Érasme de Rotterdam en médaillon (vers 1532),
au musée des beaux-arts de Bâle, en Suisse,
photographie : octobre 2018.

 

 

 

 

jeudi, 07 novembre 2019

Portrait du Maître écrivant

 

 

 

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Hans Holbein le Jeune (vers 1497-1543), Portrait d'Érasme de Rotterdam écrivant (1523)
(avec le reflet du photographe),
au musée des beaux-arts de Bâle, en Suisse,
photographie : octobre 2018.

 

 

 

 

dimanche, 16 novembre 2014

Livres amis

 

 

 

 

Tout récemment ont paru deux ouvrages, en forme de "bilan", par deux de nos rares, et réels, profonds érudits contemporains : Et dans l'éternité je ne m'ennuierai pas (Souvenirs), de Paul Veyne, et Un long samedi (Entretiens avec Laure Adler), de George Steiner. Comme nous sommes loin, les lisant, des prétendus "débats d'actualité" ! La hauteur de leurs vues, leur universalité, leur intelligence et leur bonté tranchent largement avec la bêtise contente et l'animadversion revendiquée, hélas inévitables, de ce que nous entendons et lisons provenant de cénacles plus égoïstes ou indifférents les uns que les autres, et ennemis.

 

Mon Lecteur sait mon admiration pour Érasme. Sans nécessairement comparer nos deux hommes à l'humaniste de Rotterdam et de Bâle, j'aime à penser que sa pensée se retrouve là, traversant les temps, et qu'il n'y a pas lieu d'être tout à fait pessimiste quant à la poursuite de l'esprit.

 

 

 

vendredi, 27 décembre 2013

Ces « nuages sur une paroi »




Dans une lettre qu'il adresse à son fils (d'adoption ?) Grégoire vers 390, le poète Ausone use d'une formule qui sera reprise par Érasme dans son Adage 1338 (II., IV., 38) « Nebulae in pariete », et dans son éloge de Dürer :


« As-tu jamais vu la nuée peinte sur la muraille [nebulam pictam in pariete] ? Oui, tu l’as vue, et tu t’en souviens. C’est à Trèves, dans la salle d’Éole ; c’est là qu’une peinture représente Cupidon mis en croix par des femmes amoureuses, non de celles de notre âge, qui pèchent sans regret, mais par des Héroïdes qui veulent se justifier, et punissent le dieu. Notre Virgile en a compté quelques-unes dans le champ des Pleurs. Le sujet et l’exécution de ce tableau me ravirent d’étonnement*».


Ces « nuages sur une paroi », traduction figurant dans les
Œuvres de l'humaniste due à la collection "Bouquins", désigneraient des « choses insignifiantes, aussi impalpables que des songes »**. Jacques Chomarat, dans son édition des Œuvres choisies, renchérit et parle de « chose de rien, semblable à un songe »***.


Il me semble cependant que décrire comme une chose insignifiante, une chose de rien, cette atmosphère étrange, vague, qui se dégage des plus beaux tableaux, est faire peu de cas de l'art du peintre : si ce dernier a su déposer sur du bois, de la toile ou du papier quelque air indicible, « impalpable » certes, mais hautement perceptible par le spectateur, c'est qu'une sorte de grâce l'a accompagné dans son geste, et que l'œuvre vibre, de manière inexplicable : ceci est très loin d'être insignifiant. C'est au contraire la raison pour laquelle une œuvre nous touche, et demeure vivante (signifiante) à jamais.


Reste le passage de la lettre d'Ausone, à propos de cette peinture perdue (je ne sais rien de plus fascinant que les descriptions de ces peintures englouties, par Philostrate de Lemnos dans ses Images ou par Pline dans le Livre XXXV de son Histoire naturelle), sur cette « nuée peinte sur la muraille » : nous savons qu'elle représente Cupidon crucifié par des femmes (motif inspiré par Ovide et Virgile, mettant en scène des femmes qui, abandonnées par l'être aimé, se vengent ainsi du dieu de l'Amour), mais qu'est-ce au juste que ces nuages, que cette paroi sur laquelle ils sont peints ? Il semble bien que l'expression doit être prise au pied de la lettre et qu'avant de désigner, chez Érasme, le détail vague ou l'atmosphère d'un tableau, elle fait référence à la représentation de nuages sur un mur. Ausone ne nous en dit pas plus. Cependant, il commence sa laconique description du tableau par cette mention : s'agissait-il de nuages particulièrement remarquables, des nuages à la Ruysdael, à la Georges Michel ? Mais pourquoi ces nuages se reflétaient-ils sur une paroi ? S'agissait-il d'ombres de nuages, la paroi était-elle transparente ? Mais non, Ausone parle d'une muraille... S'agit-il d'une fresque ? Ou bien, ou bien ?...  Aussi bien ne puis-je me représenter clairement ces nuages, de même que m'échappent les Quatre Vivants selon Ézéchiel... Ce que la peinture échoue à représenter parfaitement selon l'écrit, c'est peut-être dans ces « nuages sur une paroi » qu'elle y parvient par un autre chemin, celui de la suggestion, de l'évocation lointaine, chemin qui est aussi celui de la peinture qu'on nomme, trop rapidement, abstraite



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* Traduction d'Étienne-François Corpet, 1843.

** Note 3 de la page 413 de ce volume.

*** Livre de poche, 1996, p. 919.



dimanche, 15 décembre 2013

Peindre la voix

 

 

La lecture des ouvrages d'Érasme, excepté celle de L'Éloge de la Folie, est assez austère, mais on trouve, dans ses Adages et ses Colloques notamment, de vrais trésors favorables au rêve et à la recherche. Dans le dialogue De recta Latini Graecique sermonis pronuntiatione (1528), dont le titre est peu engageant il est vrai, deux amis, Leo et Ursus, évoquent les œuvres d'Albert Dürer :

« [URSUS.- :] Quant à Dürer, même si l'on doit l'admirer aussi dans d'autres domaines, que n'exprime-t-il pas dans le monochromatisme, je veux dire avec des lignes noires ! Ombres, lumières, éclats, reliefs et dépressions. En outre, grâce à son art de les agencer, ce n'est pas un aspect unique qu'il présente au regard des spectateurs. Il veille scrupuleusement aux proportions exactes et harmonieuses. Que dis-je ? Il peint même ce qui ne se laisse pas peindre, comme le feu, des rayons, des coups de tonnerre, des éclairs, ou même, comme on dit, des "nuages sur une paroi", des sensations et toutes sortes de passions, bref toute l'âme humaine, telle que la reflète l'apparence physique, et jusqu'à la voix même ! » *


Ah ! Il me faudra revenir sur ces "nuages sur une paroi". Pour le moment me retient cette peinture de la voix, belle formule qui sous la plume d'Érasme est l'hommage d'un homme de lettres à l'image qui suggère : l'humaniste, afin de diffuser son message, avait eu recours, comme tous les hommes fameux de son temps, au portrait ; voilà ses portraits, celui qu'a laissé le pinceau d'Holbein, qu'on voit au Louvre, ou celui de Metsys, qui est à Rome : ils demeurent gravés (ou devraient l'être) dans notre mémoire. On y reconnaît l'homme attentif, bienveillant, et tout en intériorité de ses livres ; on en contemple l'aura. Peut-être Érasme lui-même, contemplant les images que ses amis avaient fait de sa figure, reconnut-il que les peintres, à l'instar de Dürer, avaient su retenir la voix de leur modèle.


 

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* Érasme, [Œuvres : ] Éloge de la folie. Adages. Colloques. Réflexions sur l’art, l’éducation, la religion, la guerre, la philosophie. Correspondance. Édition établie par Claude Blum, André Godin, Jean-Claude Margolin et Daniel Ménager. Paris : Robert Laffont, 1992, pp. 412-413. (coll. Bouquins)

 

 

 

L'Érasme d'Holbein

 

 

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Hans Holbein dit le Jeune (1497-1543), Portrait d'Érasme (1523),
Musée du Louvre, photographie : décembre 2013.

 

 

(La mauvaise qualité de ma photographie s'explique par le fait qu'il est très difficile de prendre la toile en photographie, celle-ci étant située dans un petit cabinet sombre, face à une fenêtre, et protégée par une vitre qui la laisse mal voir. Le photographe-amateur est souvent mis à l'épreuve, devant tant d'adversité !)

 

11:37 Écrit par Frédéric Tison dans Musée d'un regard | Tags : frédéric tison, photographie, érasme, holbein | Lien permanent | Commentaires (2) |  Facebook |

jeudi, 12 décembre 2013

Gloire d'Érasme

 

 

 

Georges Minois, dans son excellente Histoire de la célébrité (excellente, comme tous ses livres ; c'est avec Paul Veyne, Maurice Lever et Michel Pastoureau, l'un des meilleurs historiens de notre temps), écrit que le personnage d'Érasme mériterait d'accéder à la célébrité contemporaine, si nous devions élire une figure incarnant l'idée belle de l'Europe, si celle-ci, renchérirai-je, avait un vrai visage, une vraie grandeur, si elle proposait à notre cœur et à nos regards autre chose que des décrets et des lois blêmes et mécaniques détachés de tout idéal, si elle était humaine en somme, si elle savait d'où elle vient.  

L'historien, à ce propos, se demande qui connaît encore le grand humaniste. Mon Dieu, serait-ce vrai que peu de monde se souvienne de son nom ? Cela m'est étrange. Qu'Érasme, cet homme immense, l'un des hommes d'influence les plus bienveillants, honnêtes et lucides qui fussent en Europe, soit négligé de nos jours, est sans doute une catastrophe véritable, bien plus grave que tous les maux que décrivent à l'envi les contempteurs contemporains de notre modernité, ces politiciens, écrivains, philosophes, bien plus préoccupés, dans leur intérêt personnel ou en raison de leur propre impéritie, d'alimenter l'inquiétude médiocre des uns, ou d'entretenir l'identité vacillante des autres, que de renouveler l'esprit de l'Europe, lequel meurt aussi devant tant de défauts.